Train-trip en Inde du Nord : le charme secret de Delhi la bouillonnante

L’envie de partir en Inde m’a pris du jour au lendemain. J’étais à ce moment là en voyage au Canada et j’ai été saisi par le besoin de découvrir un pays vraiment différent du mien et de ceux que j’avais pu visiter jusque là. Rapidement je fais le tour de mes proches : personne ne veut partir avec moi, l’Inde fait peur. Ce n’est pas grave, je partirai seul, en version sac à dos et train. Un an de préparation plus tard, des dizaines de vidéos regardées, des centaines d’articles lus et quelques sueurs froides liées à la demande de visa et mon statut un peu particulier de journaliste, je pars enfin pour trois semaines inoubliables en Inde.

Jour 1-2 : vol de nuit depuis Paris et premiers pas à Delhi

Ça y est ! L’Inde je t’ai imaginée, je t’ai rêvée, j’ai lu des dizaines et des dizaines d’articles à ton sujet, et même quelques romans… Et bientôt, je serai chez toi ! Après une journée consacrée aux dernières obligations (tâches ménagères essentiellement), direction l’aéroport Charles De Gaulle en fin d’après-midi pour un décollage à 22 heures. Demain, je me réveillerai à Delhi.

Lorsque j’arrive dans la capitale indienne, je me rends compte que l’on ne m’avait pas menti. L’Inde a un fonctionnement diamétralement opposé à la France. Cela commence dès l’aéroport où des dizaines de chauffeurs de taxi alpaguent les touristes. J’accepte rapidement les services de l’un d’eux pour rejoindre mon hôtel. Très vite je me rends compte que j’ai probablement payé le double du vrai prix… Tant pis ! D’autant que deux autres personnes (originaires du Cachemire, apprendrai-je ensuite) montent à l’arrière. C’est donc ça ma première impression de l’Inde : un immense bazar, le chaos, les klaxons, les refus de priorité, des véhicules qui déboulent de toutes parts…

Une fois installé à l’hôtel Prime Delhi (très confortable mais probablement fréquenté seulement par des touristes et beaucoup trop cher pour le pays), je décide d’aller manger quelque chose. Un Indien m’aide à traverser la route et l’instant d’après je me retrouve à le suivre sur un bon kilomètre, puis à monter dans un rickshaw (l’autre nom des tuk-tuk) et à déjeuner en face de lui (un dal de lentilles, cela dit excellent). J’apprendrai au cours du repas qu’il s’appelle Mic, tient un magasin, à une femme, deux filles et un garçon et est originaire des montagnes, où il rentre chaque été. Le déjeuner terminé, il me conduit mine de rien à une agence pour touristes juste à côté : le vendeur tente de me vendre toutes les activités possibles et imaginables (« You’ll hate India if you stay 5 days in Delhi ! Follow me in the countryside »), je résiste et finis par réussir à m’en sortir avec un grand sourire et une franche poignée de main.

Après une bonne sieste, je prends un rickshaw direction Féroz Shah Tomb, un complexe composé de ruines de mausolées et de mosquée. L’endroit est paisible est de nombreux jeunes couples viennent s’y promener. Je me balade ensyite dans le quartier voisin de Hauz Khas. C’est très bobo, avec de nombreuses boutiques d’art et de tatouages. Je rentre enfin a mon hôtel et dîne sur le rooftoop du restaurant Krishna.

Jour 3 : fort rouge et Chandni Chowk

Je me réveille naturellement vers 6h du matin, en pleine forme ! Problème, le petit-déjeuner de l’hôtel n’est servi qu’à partir de 8h. Une fois mon estomac comblé, je me mets en route pour le Fort Rouge (Lal Qilah en version originale). Je suis l’un des premiers sur les lieux et je profite de l’endroit dans le calme. Ce complexe, érigé au 17e siècle par l’empereur Moghol Shah Jahan était initialement une résidence impériale. Il est composé de nombreux bâtiments destinés à le loger avec sa famille, mais aussi un hammam ou encore un espace destiné à des combats entre des lions et des éléphants (qui gagne selon vous entre le 🦁et l’🐘?).

Je découvre que ce n’est pas une légende : à plusieurs reprises des Indiens m’arrêtent pour brièvement discuter avec moi et surtout faire un selfie ! Un jeune homme, Ekhai, ira même plus loin, me faisant devenir pendant de looooongues minutes son photographe personnel. Dans le complexe du Fort Rouge, plusieurs musées sont présents : ils retracent la guerre et l’accession à l’indépendance de l’Inde. Constat après la visite : on ne peut pas dire qu’un effort d’objectivité et d’impartialité a été fait dans la manière de raconter l’histoire.

Direction ensuite le marché voisin, Chandni Chowk. On peut absolument tout y trouver : habits, objets électroniques, coton, épices… Je teste une spécialité de street-food dans une ruelle : délicieux mais si pimenté ! Il m’a fallu près d’un quart d’heure pour reprendre le contrôle de ma bouche. Je déjeune ensuite d’une spécialité locale de nouilles (délicieux) et visite Gurudwara Sis Ganj Sahib, un temple Sikh. L’atmosphère y est très apaisante, et je reste assis dans le fond un bon moment, à simplement observer les fidèles venus prier et à écouter les musiciens et chanteurs. En repartant, je croise Gill, qui m’arrête et discute avec moi. Il a 53 ans et a un fils de mon âge. Il me questionne sur mon séjour en Inde et se laisse prendre en photo : il a un look incroyable !

J’essaie ensuite de rejoindre la partie épices du marché. Je suis le chemin sur Google Maps mais j’atterris en plein quartier des livres. Je finis par accepter de me faire guider en rickshaw, mais le conducteur me ramène… Au point de départ ! Deuxième tentative avec un autre chauffeur, qui m’amène au bon endroit, mais exige finalement plus que la somme négociée initialement. Une petite foule d’indiens se forme autour de nous : je ne comprends rien ! Mon salut proviendra finalement d’une personne parlant un peu mieux anglais. Je m’en sors en payant plus que le prix négocié, mais moins que la somme demandée en fin de course.

C’est bon, je peux profiter du marché aux épices…! Sauf que non : c’est pour eux un jour férié et toutes les échoppes sont fermées. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas ! Je poursuis ma visite du quartier par un temple Hindou. On me laisse entrer gratuitement, mais un homme me passe ni une ni deux, un collier de fleurs autour du coup et me fait le tilak, fameux point coloré… Avant de me demander des sous… Et qu’un deuxième homme recommence la même opération, toujours facturée. Un peu agacé par ces pratiques, j’écourte ma visite et prend la direction de la mosquée Jama Masjid !

Cette mosquée est sublime, mais là encore, au prétexte une visite expéditive et peu compréhensible, un employé me réclame 10 euros (oui oui), je m’en sors en donnant finalement quelques roupies. À la sortie, je me mets à discuter avec Azeem et Aman, 23 et 25 ans. Le premier est musulman, le deuxième hindou et ils sont meilleurs amis. Nous parlons de l’Inde, de la France, de ce qu’il y a à faire à Delhi. Nous discutons aussi du ressenti d’une partie des jeunes indiens : pas vraiment d’espoirs d’évolution professionnelle ici, alors certains veulent partir vivre a l’étranger. Azeem rêve de Dubaï, même si, me dit-il, ce sera dur de vivre loin de sa famille et de la terre qui l’a vu grandir. Je repasse voir rapidement Chandni Chowk de nuit, et rentre (non sans mal) en rickshaw ! Le dîner est pris dans un restaurant en rooftoop, juste en face de celui de la veille au soir !

Jour 4 : Féroz Shah Kotla et observatoire Jantar Mantar

Encore une fois, je me réveille naturellement vers 6h30, alors dès 8h45 je suis au fort de Féroz Shah Kotla. Souvenez-vous, ma première après-midi à Delhi, j’étais allé visiter sa tombe, l’endroit était d’ailleurs très apaisant. Là encore, c’est très calme. Le lieu comporte une mosquée et il y a donc quelques musulmans venus prier, mais à part ça, je suis tout seul.

Le site est essentiellement composé de ruines, et il y a un puits bien conservé mais dont on ne voit pas grand-chose puisque fermé. Je reste là environ une heure avant de prendre la direction d’India Gate (la porte de l’Inde). Un rickshaw me dépose devant, et je me mets en quête de la flamme du soldat inconnu, mais elle est introuvable. Peut-être un peu en hauteur ? L’édifice a été construit dans les années 1920 pour commémorer les morts indiens de la 1ere guerre mondiale et de la 3e guerre anglo-afghane.

Je décide de marcher jusqu’à ma prochaine étape, mais je dois traverser une très large et fréquentée route. J’hésite, patiente, et finalement un indien me prend sous son aile : je traverse avec lui, en espérant que les voitures ralentiront un peu en nous voyant : c’est effrayant ! Après un peu de marche, j’arrive à la forteresse de Purana Qila. La zone est habitée depuis environ 5.000 ans, mais c’est au 16e siècle que le Sultan Humâyûn décide de tout faire reconstruire ici. Alors que Delhi vient de redevenir la capitale indienne, il y installe le siège de son pouvoir. Quelques années après, il meurt en tombant dans des escaliers. Son successeur, Shah Jahan, considère alors que le lieu est maudit et décide de faire construire Red Fort.

Après ma visite, je décide de prendre un rickshaw pour aller dans le quartier des ministères. Il me semble repérer sur la carte quelques restos sympas pour manger, mais en fait la zone n’a aucun intérêt et on ne voit pas vraiment ces beaux bâtiments que sont les ministères. Je me rapproche alors de Connaught Place où je mange mon repas le plus cher jusque là (quasiment dix euros !) avant d’aller visiter Jantar Mantar.

Cet observatoire astronomique date du 17e siècle. Sa construction (ainsi que cinq autres sites similaires dans le pays) a été ordonnée par un sultan qui avait compris l’intérêt d’étudier les mouvements du soleil, de la lune et de mars pour rendre les calendriers plus précis. Je termine ma journée à Ugrasen Ki Baoli, un « puit à degré » dont l’architecture est admirable. Je rentre à mon hôtel un peu avant 18h, car plutôt fatigué ! Le soir, je prends mon dîner dans un petit restaurant à côté de mon hébergement : je mange pour à peine deux euros.

Jour 5 : autour du tombeau d’Humayun

Quatrième jour à Delhi et toujours des choses à faire et à voir sur ma liste. Serais-je sur le point de faire mentir les tours operators locaux qui m’ont dit en arrivant que si je restais cinq jours à Delhi j’allais détester l’Inde ? La vérité, c’est que je trouve ce pays de plus en plus incroyable. Alors certes, de prime abord, c’est un bordel. C’est parfois sale, niveau odeurs dans la rue on passe rapidement de l’encens, à la nourriture, à l’urine. Beaucoup d’indiens accostent les touristes pour essayer de les entuber mais d’autres viennent juste pour discuter (« What do you think about India ? Beautiful right ?! »).

Ce vendredi, réveil encore assez tôt après une nuit plutôt mauvaise. Ce n’est pas ça qui va m’empêcher d’aller voir l’un des joyaux de Delhi, bien au contraire. Encore une fois, me voilà l’un des premiers visiteurs à la tombe d’Humayun, un empereur Moghol. Il y a un petit air de famille avec le Taj Mahal, et c’est normal. La construction de cet édifice (qui contient les sépultures de quelque 150 personnes) a servi d’ébauche avant la construction du Taj. Le complexe comporte différents monuments et bâtiments à voir (tombe d’Isa Khan, la mosquée…), ils sont tous sublimes.

Au passage, un des gardiens du site, au prétexte de rapides explications non sollicitées réclame son pourboire : c’est le jeu. Ensuite, je marche quelques centaines de mètres vers la tombe d’Absul Rahim Khan. Cet autre mausolée ressemble au précédent, quoi que plus modeste. Il est aussi moins bien conservé et n’attire aucun visiteur. J’ai le site pour moi tout seul !

Midi approche, et je rejoins la nurserie Sunder, un grand parc comportant une quinzaine de monuments (tombes, mausolées, bâtiments anciens) et abritant des paons. L’endroit est très paisible, bien entretenu et j’ai l’impression que c’est un point de rencontre pour les jeunes des classes aisées de Delhi. Lycéens et jeunes adultes viennent passer du temps entre amis ou flirter. J’observe que beaucoup sont habillés « à l’occidentale ». En me baladant, je tombe sur un groupe d’une dizaine d’ados, assis bien sagement sur une ruine… La scène est trop belle, je leur demande si je peux les photographier, s’ensuit un long shooting, chacun voulant son portrait !

Je déjeune dans le parc au restaurant Fabcafe by the Lake (je prends un curry au fruit du jacquier, surprenant mais excellent) puis prend la direction de Bada Gumbad. C’est un complexe composé de plusieurs mausolées, l’entrée est gratuite et le moment est calme et vraiment agréable. Je rencontre Alam Prince qui tourne des vidéos pour sa chaîne YouTube et décide de m’interviewer. Qu’est-ce que j’aime en Inde ? Dans quels pays suis-je déjà allé ? Ce que je fais comme travail ?

Alors que je décide de rentrer à mon hôtel, je tombe sur une parade avec musiciens et échassiers. Je suis le cortège un petit moment, avant d’entendre parler français ! Je demande à l’homme de m’expliquer ce qu’il se passe. Il est le directeur adjoint de l’Alliance Française de Delhi, et ce défilé est organisé par cet organisme. Frédéric m’invite à entrer dans le bâtiment et je découvre une expo d’art en réalité augmentée.

Le soir, je ressors du dîner dans un restaurant du coin. Alors que j’écris ces lignes l’équipe de karatéka de la ville de Lucknow s’installe à ma table. Nous discutons de tout et de rien et rions beaucoup ! Après le repas, en rentrant à mon hôtel je croise la route d’un mariage indien, dont les fêtards paradent dans la rue au son des tambours !

Jour 6 : temple du Lotus et temple d’Akshardam

Une fois n’est pas coutume, je me lève un peu plus tard, et ne débute ma journée de visite qu’aux alentours de 9h30. Je saute dans un rickshaw, direction le temple du lotus. Le bâtiment a été construit dans les années 1980 et il est mondialement connu, car au-delà de l’aspect religieux, il a remporté de nombreux prix d’architecture. Il appartient au courant religieux du bahaïsme, mais les croyants de toutes les religions sont les bienvenus pour prier et méditer. Je me fais arrêter à plusieurs reprises par des visiteurs indiens qui, voyant mon gros appareil photo demandent à être photographiés. Je le fais toujours avec plaisir.

Le temple est principalement constitué d’une immense salle de prière, où le silence règne. Jusqu’à 1.300 personnes peuvent y entrer. Les photos sont en revanche interdites. Je prends ensuite un rickshaw direction Qtub Minar. Je note que le tuktuk est conduit par une femme, ce qui est extrêmement rare, la profession étant composée à vue d’œil de 99,99% d’hommes. Qtub Minar est l’un des sites les plus fréquentés de Dehli : je regrette d’y arriver aux alentours de midi et donc de faire face à une importante foule. L’endroit vaut tout de même le détour : c’est le plus haut minaret d’Inde et le troisième plus grand au monde. Il a été construit entre le 12 et le 14e siècle pour « célébrer » l’arrivée au pouvoir des musulmans dans le pays. Sur place, je fais la connaissance d’élèves d’un collègue en langue anglaise. Ils sont là pour un exercice et doivent parler au plus d’étrangers possible (et nous ne sommes pas très nombreux, alors c’est littéralement tout un collège qui est venu me parler !). C’est une chouette rencontre, ils sont super drôles et curieux et parlent avec un très bon anglais.

Je déjeune dans un petit restaurant du coin (un boui-boui, osons le mot) avant de prendre un taxi pour le temple d’Akshardam, à l’autre bout de la ville. Le site m’a été suggéré par un chauffeur de tuktuk rencontré précédemment. À l’intérieur de ce lieu de culte hindou à peu près rien n’est autorisé : sauf le portefeuille. Sacs, téléphones, appareils photos, nourriture doivent rester à la consigne.

Pour des raisons religieuses et de respect de ce lieu sacré me direz-vous ? J’ai plus le sentiment que la raison est mercantile. Le temple est absolument magnifique, et il est à voir si vous êtes de passage à Dehli. l’intérieur est tout en marbre, l’extérieur en pierres rouges sculptées, c’est sublime et à peine croyable. En revanche, l’atmosphère donne une impression de Disneyland de la religion : on y vend des popcorns, on peut payer pour assister à une projection iMax ou un son et lumière sur une fontaine. La boutique de souvenirs rendrait jaloux Mickey et pour 2€50 on repart avec son portrait encadré devant le temple (évidemment, je l’ai fait !). Bref, je ressors de là un peu circonspect (et sans photo ni vidéo !).

Je prends ensuite la direction de Connaught Place, le quartier des boutiques occidentales. Sur la route le chauffeur de tuktuk me montre toutes les photos de sa copine et lui (en vrai ils sont mignons). Je reste un peu dans le quartier pour riches où l’on trouve les magasins des grandes marques (quel contraste !), avant de rentrer à mon hôtel et de dîner à deux pas de là. Demain, je me lève avant 5h pour prendre un train : direction la suite de mes aventures indiennes hors de la capitale !

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